BURKINA FASO IV REPUBLIQUE
------------ SEPTIEME LEGISLATURE
UNITE-PROGRES-JUSTICE
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ASSEMBLEE NATIONALE
LOI N° 009-2018/AN
PORTANT EXPROPRIATION POUR CAUSE D’UTILITE PUBLIQUE
ET INDEMNISATION DES PERSONNES AFFECTEES PAR LES
AMENAGEMENTS ET PROJETS D’UTILITE PUBLIQUE ET
D’INTERET GENERAL AU BURKINA FASO
L’ASSEMBLEE NATIONALE
Vu la Constitution ;
Vu la résolution n°001-2015/AN du 30 décembre 2015 portant validation du mandat des députés ;
a délibéré en sa séance du 03 mai 2018
et adopté la loi dont la teneur suit :
CHAPITRE 1 : DES DISPOSITIONS GENERALES
Section 1 : De l’objet et du champ d’application
Article 1 :
La présente loi a pour objet de déterminer les règles et les principes
fondamentaux régissant l’expropriation pour cause d’utilité publique et
l’indemnisation des personnes affectées par les aménagements et projets
d’utilité publique et d’intérêt général au Burkina Faso.
Article 2 :
Les opérations dont la réalisation nécessite l’expropriation pour cause d’utilité
publique sont :
- les infrastructures de transport notamment les routes, la voirie urbaine, les
chemins de fer, les aérogares ;
- les travaux et aménagements urbains, agricoles, forestiers, pastoraux,
fonciers ou miniers ;
- les travaux militaires ;
- la conservation de la nature ;
- la protection de sites ou de monuments historiques ;
- les aménagements hydrauliques ;
- les installations de production et de distribution d'énergie ;
- les infrastructures sociales et culturelles ;
- l’installation de services publics ;
- la création ou l’entretien de biens ou ouvrages d'usage public ;
- les travaux d'assainissement ;
- les travaux et aménagements piscicoles ;
- toute opération destinée à satisfaire ou préserver l'intérêt général.
Article 3 :
Les personnes qui initient les opérations dont la réalisation nécessite
l’expropriation pour cause d’utilité publique sont l’Etat, les collectivités
territoriales et les investisseurs privés.
Article 4 :
Les droits et matières objet d’indemnisation ou de compensation visés sont les
droits réels immobiliers, à savoir la propriété, le droit de superficie, l’usufruit,
l’emphytéose, les droits d’usage, les droits d’habitation, les servitudes,
l’antichrèse ou nantissement immobilier, les privilèges, les hypothèques et les
possessions foncières rurales.
Article 5 :
Ne peuvent faire l’objet d’expropriation pour cause d’utilité publique :
- les biens régis par des conventions et traités ratifiés par le Burkina Faso ;
- les terres des missions diplomatiques et consulaires au Burkina Faso ;
- les terres des institutions internationales gouvernementales et non
gouvernementales au Burkina Faso.
Section 2 : Des principes et des définitions des termes et expressions
Article 6 :
Les indemnisations résultant de l’expropriation pour cause d’utilité publique
sont régies par les principes généraux ci-après :
- le respect du droit de propriété des personnes affectées ;
- le respect des droits humains ;
- le respect des valeurs culturelles et de l’organisation socio-spatiale
initiale des populations affectées ;
- la promotion socio-économique des zones affectées ;
- l’implication de tous les acteurs concernés dans les processus
d’indemnisation ;
- le respect du genre ;
- le respect du développement durable ;
- la bonne gouvernance ;
- le dialogue et la concertation avec les personnes affectées ;
- la compensation terre contre terre aussi bien pour les terres urbaines que
rurales.
Article 7 :
Au sens de la présente loi, on entend par :
- antichrèse ou nantissement immobilier : le contrat par lequel le constituant se dessaisit au profit du créancier d'un droit réel immobilier qu'il lui donne en garantie avec transfert du droit de jouissance ;
- autorité expropriante : l’Etat ou la collectivité territoriale ;
- bonne gouvernance : la gestion transparente dans le respect des droits de l’homme, la lutte contre la corruption, la promotion de la démocratie et le développement participatif et durable ;
- compensation : le mécanisme juridique consistant à remettre à une personne affectée, une valeur ou un bien en réparation d’un dommage subi du fait de la réalisation d’un projet d’utilité publique ou d’intérêt général ;
- déclaration d’utilité publique : l’acte par lequel l‘État ou la collectivité territoriale décide d’utiliser un périmètre déterminé du territoire national, pour la réalisation de l’une des opérations prévues à l’article 2 ci-dessous et invite, de ce fait, toute personne, propriétaire titulaire de droits à l’intérieur dudit périmètre à faire valoir ses droits à compensation ;
- déclaration de cessibilité : l’acte administratif qui identifie et délimite les immeubles ou biens à exproprier ;
- droit de superficie : le fait de posséder des constructions, ouvrages ou plantations sur un fonds appartenant à autrui ou d'être autorisé à en établir ;
- droit d'habitation : le droit d'occuper des locaux pour y demeurer avec sa famille. Il s'établit par convention ;
- droit de propriété : le droit d’user, de profiter et de disposer d’une chose et d’en être le maître absolu et exclusif dans les conditions fixées par la loi ;
- droit réel immobilier : le droit qui porte directement sur un bien immeuble et qui procure à son titulaire tout ou partie de l’utilité économique de ce bien ;
- droit d'usage : le droit de se servir d'un bien immeuble et d'en percevoir les fruits dans les limites de ses besoins et de ceux de sa famille. Il s'établit par convention ;
- emphytéose : un contrat de longue durée de dix-huit ans au minimum et de quatre-vingt-dix-neuf ans au maximum ;
- enquête parcellaire : une enquête visant à déterminer de façon précise les immeubles ou autres biens à exproprier, à connaître les propriétaires concernés, les locataires et tous ceux qui plus généralement peuvent prétendre à une indemnité ;
- expropriation pour cause d’utilité publique : la procédure par laquelle l’Etat ou la collectivité territoriale peut, dans un but d’utilité publique et sous réserve d’une juste et préalable indemnisation, contraindre toute personne à lui céder la propriété d’un immeuble ou d’un droit réel immobilier ;
- fonds dominant : la propriété qui profite de la charge ou contrainte imposée du fonds servant ;
- fonds servant : la propriété qui supporte la charge que constitue la servitude pour accéder au fonds dominant ;
implication de tous les acteurs concernés dans les processus
d’indemnisation : la participation effective des populations, des
collectivités territoriales, des services déconcentrés de l’Etat et des
investisseurs à toutes les étapes des processus d’indemnisation ;
indemnisation : la réparation intégrale en espèce et/ou en nature du
préjudice subi par la personne affectée du fait de la réalisation d’un projet
d’utilité publique et d’intérêt général ;
intérêt général : la finalité des actions, projets ou aménagements
entrepris par l’Etat ou la collectivité territoriale qui présentent une
valeur ou une utilité pour l’ensemble de la communauté considérée ;
juste et préalable indemnisation : la réparation intégrale du préjudice
direct, matériel, moral et certain causé par la privation du droit de
propriété avant toute expropriation ;
personne affectée : la personne physique ou morale dont les droits se
trouvent affectés du fait de la réalisation d’un projet d’utilité publique ou
d’intérêt général ;
possession foncière rurale : le pouvoir de fait légitimement exercé sur
une terre rurale en référence aux us et coutumes fonciers locaux ;
préjudice : le dommage causé à autrui du fait de la réalisation d’un projet
d’utilité publique et d’intérêt général ;
privilèges : le droit que la qualité de la créance donne à un créanci er
d'être préféré aux autres créanciers ;
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promotion socio-économique des zones affectées : la réalisation des
projets d’utilité publique et d’intérêt général doit contribuer à l’essor
économique et social de leurs zones d’implantation ;
respect des droits humains : le respect des droits universels inhérents
à la personne humaine, inaliénables, sacrés et opposables en toute
circonstance à tous ;
respect du développement durable : la réponse aux besoins actuels
des populations sans compromettre les possibilités pour les générations
futures de répondre à leurs propres besoins. Il garantit la durabilité
écologique, la viabilité économique et l’équité sociale ;
– respect du droit de propriété des personnes affectées : le droit pour
toute personne de ne pas être contrainte de céder sa propriété, si ce n’est
pour cause d’utilité publique et moyennant une juste et préalable
indemnisation ;
respect du genre : la prise en compte des besoins et conditions
spécifiques des différents groupes sociaux vulnérables (les personnes
vivant avec un handicap, les malades chroniques, les démunis, les
personnes de troisième âge, les veuves et veufs, les femmes chefs de
ménages et les enfants) ;
servitudes ou services fonciers : des charges imposées à un immeuble
bâti ou non bâti appelé fonds servant au profit d'un autre immeuble
appartenant à un propriétaire distinct appelé fonds dominant ;
usufruit : le droit qui résulte d'un contrat par lequel le propriétaire
autorise l'usage et consent les fruits d'un bien immobilier à son
contractant, personne physique ou personne morale de droit public ou
de droit privé, à charge pour elle d'en conserver la substance ;
utilité publique : la déclaration de l’autorité publique par laquelle une
opération est reconnue comme présentant un intérêt pour la
communauté ;
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valeur actuelle : la consistance (prix ou estimation monétaire) du bien
au jour de l’établissement du procès-verbal de constat ou d’évaluation
des investissements.
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